Jeune journaliste et reporter à la rédaction du journal Elima, je faisais souvent partie de la délégation de Zaïko Langa Langa lors de ses tournées pour en rendre compte. Fort de ce statut (journaliste), j’avais droit à une chambre et le reste du groupe devrait partager à deux une chambre, parfois à trois. Je remonte dans les souvenirs ! Jeme souviens que Jossart partageait la sienne avec Bimi et Evoloko avec Bozi pour ne citer que ces quatre grands. Mais curieusement, il y avait quelqu’un qui avait comme moi une chambre à lui seul également. Mais il était toujours seul comme s’il ne faisait pas partie de la délégation. Cet homme, c’est DV Moanda Di Veta co-fondateur et batteur de Zaïko. Il m’étonnait et me semblait à la fois bizarre. Un 1er mai 1980, jour de Fête de travail, nous étions à Kananga en provenance de Mbuji-Mayi, je pose la question à Jossart : « Pourquoi DV n’est jamais avec tout le monde ? ». Et lui de me répondre : »D’abord parce qu’il est plus âgé que nous tous et ensuite il est mystique ». Du coup, j’avais compris ce que voulait dire, « il est mystique ».
Et depuis, j’avais une peur bleue de lui. DV est la seule personne qui s’était donné corps et âme pour mettre Zaïko sur pied. Il savait comment trouver de l’argent pour louer les instruments et surtout recruter les musiciens même les démettre. DV avait tout donné et tout sacrifier pour ce groupe se maintienne et qu’il considérait comme son unique enfant. Dans un témoignage récent de retour de leur tournée aux USA, Jossart N’yoka parlant de lui en réponse justement à la question de savoir si DV était féticheur, il dira : »Je ne peux pas le confirmer ». Avant d’ajouter : »Peu avant sa mort, il est venu me voir, j’étais encore à Kasa-Vubu pas loin de marché Gambela, il m’a servi un verre d’eau dans lequel il avait bu auparavant en me disant : ceci est un pacte que je signe avec toi pour te laisser l’orchestre ». Et invariablement, on disait de lui qu’il était « féticheur » que c’est lui détenait le secret du succès de Zaïko et même « les grigris »…
Il est mort le 10 janvier 1984 à 36 ans (né le 11octobre 1948 à Léopoldville). De ses cinq enfants il n’en reste que sa fille cadette qui réside en Belgique.
Voilà en quelques traits l’histoire de cet homme qui était quelqu’un à part, effacé mais efficace agissant dans l’ombre.