Les premières maisons d’édition apparurent à Léopoldville au début de la deuxième moitié des années 40. Installées pour faire des enregistrements des folklores congolais, ces maisons d’éditions ont élargi leurs champs d’action aux musiciens individuels, accompagnés d’un instrument de musique moderne ou en duo. Au départ, ces musiciens signaient des contrats de cession de chansons ou d’accompagnement d’autres musiciens au studio.
En effet, bon nombre de musiciens célèbres se sont révélés, lors de leur passage au sein de maisons d’édition, à l’instar de Grand Kalle et Franco. Les plus grands orchestres d’avant l’indépendance sont sortis des maisons d’édition en l’occurrence African Jazz, Conga succès, Ok Jazz, Rock’A Mambo.
Ces maisons d’édition, à travers leurs réseaux en Afrique et en Europe, ont permis à la musique congolaise moderne d’éclore et de rayonner à travers le monde. Leur création a constitué un tournant décisif dans le processus d’élaboration de cette musique.
A la fin de la deuxième guerre mondiale, Fernand Janssens crée la Société belge du disque (Sobedi) avec des labels comme Olympia, Novelty, Kongo bina et Lomeka. Entretemps, Monsieur Patou est chargé de procéder aux enregistrements de la musique locale pour le compte de la Sobedi.
Olympia est la toute première qui prend l’envol. Elle est l’œuvre de Monsieur Patou sous la direction de monsieur Fernand Janssens. Le chef de studio est monsieur Gert. Les premiers à enregistrer chez Olympia sont Manoka Desaïo, Jean Pierre Mayombe, Adolphe Ngondoko et Paul Mputu. En 1947, Nicolas Jeronimidis décide d’enregistrer la musique traditionnelle du Congo belge. Il a enregistré plus de 4500 chansons dont certaines n’ont pas été exploitées.
Les premiers à enregistrer chez Ngoma des frères Jeronimidis (Alexandre et Nicolas) sont les musiciens individuels s’accompagnant d’un instrument (guitare, accordéon, saxophone, trompette, etc.). Ngoma prend forme en 1949 et élargit ses activités à la musique moderne urbaine. La galvanoplastie et le pressage sont faits à Bruxelles et les disques sont réexpédiés à Léopoldville puis vers d’autres capitales africaines (Douala, Freetown, Lagos).
Gallaphone s’occupe des produits de Ngoma en Afrique du sud et Sales Distributors en Afrique de l’Est. On doit aux frères Jeronimidis le rayonnement de la musique congolaise. Plusieurs musiciens vont intégrer cette maison d’édition entre autres Bowane, Wendo, Bukasa, Willy Mbembe, Antoine Kasongo, Antoine Moundanda, Camille Mokoko, Raphaël Kabangu,
En 1949, Moussa Benathar crée les éditions Opika avec comme sociétaires D’Oliviera, Paul Mwanga, Jhimmy, Taumani, Tino Baroza, Nginga Pierre, Crispin Loleka, Michel Bula, Yambi Camille, Dula Georges, Yamba Yamba, Marcellin Laboga, Kalle Jeff, Lucie Eyenga, etc. Les sociétaires forment le groupe Bana Opika qui servira plus tard de l’ossature de l’orchestre African Jazz de Grand Kalle, le tout premier orchestre moderne de la musique congolaise.
En 1951, Papa Dimitriou crée les éditions Loningisa avec le concours de Bowane avec comme sociétaires Bowane, Dewayon, Delalune, Luampasi, Honoré Liongo, Pandi, Rossignol, Essous, Franco, Bikunda, etc. Sous l’instigation de Bowane, les sociétaires créent un groupe de prestation appelé Bana Loningisa dont bon nombre seront à la base de la création des orchestres Ok Jazz et Conga succès.
En 1952, on assiste à la création des éditions CEFA (compagnie des enregistrements du folklore africain) par Bill Alexandre et Bowane est de cette aventure. Les premiers sociétaires sont Roger Izeidi, Vicky Longomba, Guy Léon Fylla, François Engbondu, Marcelle Ebibi, Roitelet.
En 1956, avec le concours de Bowane, qui a quitté les éditions Esengo, Dino Antonopoulos crée les éditions Esengo avec des musiciens comme Essous, Rossignol, Roitelet, Tino Baroza, Pandi, Alphonse Epayo, Maproco, etc. Certains sociétaires comme Essous, Rossignol et Pandi vont fonder l’orchestre Rock’A Mambo.
L’apport des musiciens européens œuvrant dans lesdites maisons d’édition comme le saxophoniste Fud Candrix, l’organiste Pelaies et le guitariste Bill Alexandre a été d’une grande importance dans la formation des musiciens congolais. Ils ont apporté leur expérience et savoir-faire dans l’élaboration de cette musique en gestation. Sans ces maisons d’édition, la musique congolaise moderne n’aurait pas connu cette éclosion de talents et son rayonnement à travers le monde.
Herman Bangi Bayo