Que reste-t-il encore de Kin-la-belle, cette mégalopole qui, autrefois, dégageait un aura autour duquel se cristallisait l’émergence d’une Afrique ambitieuse résolument tournée vers l’avenir? Presque rien.
Que des souvenirs enterrés! Que d’espoirs déçus! Cent ans après, Kinshasa continue encore paradoxalement à se rechercher, constamment attirée vers le bas par un magnétisme du chaos, alors qu’elle était censée réaliser un saut qualitatif en termes de progrès.
Ville tentaculaire, troisième agglomération la plus peuplée du continent après Caire et Lagos, Kinshasa peine à défendre son statut. En cette année jubilaire, du reste non célébrée jusqu’à ce jour, la ville est toujours sous perfusion.
Cent ans après, c’est une ville sale, congestionnée et sans âme qui s’offre à la critique avec ses tas d’immondices empilés le long des avenues, ses quartiers vieillots saturés, ses chaussées rongées par l’humidité et ses épaves de voitures abandonnés sur des emprises publiques. Ce Kinshasa des « Wewas » et des « Kulunas », aux embouteillages infinis, résultat d’un aménagement raté, est au bord du gouffre.
Écartelée entre l’extrême pauvreté et le manque criant d’infrastructures, la première ville francophone du monde a atteint, ces dernières années, le summum de la déliquescence. Ses problèmes sont complexes et touchent autant les infrastructures que la morale publique, conséquence d’une croissance spatiale rapide et anarchique.
Le tout nouveau Gouverneur en passe d’être élu par l’Assemblée provinciale, aura fort à faire pour restituer cette capitale emblématique dans sa splendeur d’antan. Il devra, pour ce faire, impliquer ses administrés dans l’œuvre de la reconstruction, ou mieux, de la renaissance.
Tout kinois digne de ce nom est astreint à accompagner le nouveau Gouverneur dans cette oeuvre salvatrice, mais aussi, à magnifier sa ville, à l’aimer, à la garder toujours propre et, au finish, à créer avec elle une osmose susceptible d’impulser un nouvel élan du progrès.
Nonobstant ce côté sombre de leur ville, les Kinois n’en conservent pas moins un sens prononcé de l’ambiance et de la bonne humeur. Cela fait partie de leur ADN. Demain sera peut-être mieux…
Jean Pierre Eale Ikabe