Depuis quelques années, la RD Congo acquis la réputation des nations qui honorent ceux qui ont vendu chère sa culture entre autres les artistes musicien toutes disciplines confondues. Ce qui est fait de Papa Wemba, Seigneur Tabu Ley, Wendo Kolosoy, Franco Luambo Makiadi et les autres, devait l’être également le célèbre Dr Nico d’heureuse mémoire, mais…
Malgré l’immense œuvre laissée à la postérité, ce virtuose de la guitariste, ce guitariste émérite ne reçoit pas les hommages dignes de son héritage musical qui constitue un pan de notre patrimoine culturel. Mieux vaut tard que jamais, 39 ans durant, cette reconnaissance se fait toujours attendre et avec l’inscription de la rumba sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Unesco, pourquoi ne pas créer un prix du concours de la guitare lui dédié ? Bon nombre de guitaristes de la génération suivante, qui se sont distingués, se reconnaissent de son école et lui vouent de la révérence.
Ça ne sera que justice faite et la Nation manifestera sa reconnaissance envers ce digne fils qui a porté plus haut et très loin le flambeau de notre musique.
Parcours
Né le 7 juillet 1939, guitariste, chanteur, auteur-compositeur, Nicolas Kasanda wa Mikalayi dit Dr Nico est issu d’une famille de guitaristes dont son grand frère Déchaud Charles Mwamba et ses deux cousins Tino Baroza et Dicky Baroza. Très précoce, Dr Nico débute sa carrière musicale sous les auspices de son grand frère Déchaud Mwamba en 1951 à l’âge de 12 ans aux éditions Opika en qualité de chanteur. Il participe au chant aux enregistrements de chansons comme Mwamba ya Mamo et Abeta mukashi mwimpe du groupe Depe avec l’accompagnement aux guitares de Dechaud Mwamba et Gobi Boyimbo. Il va enregistrer ses propres compositions telles Elisa mukashi wa Mwamba et Mwamba Charles ne Pierre bai ku Kasaï.
Durant deux ans, le jeune Nico Kasanda apprend assidûment le maniement de la guitare et son doigté impressionne même ses aînés qui finissent par le présenter à Grand Kalle. Imitant le jeu de son cousin Tino Baroza, un virtuose de la guitare, il finit par surclasser tous les autres guitaristes qu’il a trouvés auxdites éditions entre autre son frère aîné Dechaud, Yamba Yamba, Gobi, Depe, etc.
Ayant rapidement et trop jeune maîtrisé le maniement de la guitare, il est surnommé Nico Mobali c’est-à-dire Nico, un vrai homme, un costaud, un solide.
Eblouissant dans ses interprétations, Nico est incorporé dans African Jazz, le groupe que Grand Kalle vient de mettre en place en 1953, il n’a que 14 ans. Cet adolescent qu’on peut qualifier de génie va se surpasser dans l’exécution de chansons d’anthologie comme Kalle Kato, Parafifi, Nzela mosika, Bolingo lokola like, etc. Il est le soliste attitré de cet orchestre dès sa création jusqu’en 1957, l’année de faillite des éditions Opika. Il se confirme aussi comme un auteur compositeur pétri de talent à travers des œuvres comme Rita mwasi na nga, Bernadette yaka, etc.
Aux nouvelles éditions Esengo, son hégémonie est partagée avec deux autres solistes de talent comme Tino Baroza, son mentor et Papa Noël, avec qui concomitamment, il exécute les œuvres d’African Jazz et Rock’A Mambo. Au sein de cette maison d’édition, il va se distinguer dans l’interprétation des œuvres telles Nini olobi na nga, Chauffeur Laurent Masibu, etc. Et c’est lui qui est au solo dans la célèbre chanson Kelya du jeune Tabu Ley sortie en 1959.
Il va manifester son mécontentement déjà en 1959 après une prestation à Brazzaville mais il accepte d’accompagner l’orchestre à la Table ronde de Bruxelles de janvier 1960 avec d’autres collègues comme Vicky Longomba, Roger Izeidi, Brazzos, Déchaud, Petit Pierre et Grand Kalle. Ensemble, ils vont faire plusieurs enregistrements de chansons entre autre la célèbre Indépendance cha cha et Table ronde. Nico sort la chanson Sophia motema.
Au retour, durant deux ans, Nico fonde sa propre aile d’African Jazz avec presque tous les musiciens sauf Grand Kalle et Roger Izeidi.
Ils finissent par se réconcilier en 1962 et vont aller enregistrer en Belgique des œuvres comme Paracomando, Ruffine missive, Nkulu Norbert, etc.
L’année suivante, il quitte l’African Jazz avec Rochereau Déchaud, Roger Izeidi pour aller créer l’African Fiesta et ils vont rester ensemble jusqu’en 1966, date de la partition de ce groupe en deux ailes African Fiesta Sukisa et National. Cette période est marquée par la fusion de talents de deux artistes d’exception, l’un, dieu de la guitare et l’autre, seigneur du chant. Ils vont gratifier les mélomanes des œuvres d’anthologie comme Rendez-vous chez là-bas, Molangi ya malasi, Mukala, Nizi, Maria Chantal, etc. Ils sont les seuls à faire face à la puissance de l’Ok Jazz de Franco et Vicky Longomba. Nico va étaler son talent d’auteur-compositeur à travers des chansons comme Biantondi Kasanda, Caroline, mwasi na nga nalingaka, etc.
Durant près d’une décennie, après sa séparation avec Tabu Ley, Dr Nico maintient le navire African Fiesta Sukisa à flot avec des chanteurs talentueux comme Kwamy Munsi, Paul Mizele, Dionga Apôtre, Chantal, Sangana, Lessa Lassan, Josky Kiambukuta et l’orchestre gratifie les mélomanes des œuvres de haute facture comme Toyebi nganga na bino, Soki nyama aleyi moto, Zadio, Kiri kiri mabina mboka, Nakeyi Abidjan, Sadi, etc. Nico Kasanda caracole au sommet des hits parades près de 10 ans durant.
L’étoile de Nico Kasanda commence à pâlir vers la fin de l’année 75 et il connaitra une longue traversée de désert. Malgré la main tendue de Rochereau en 1980 en l’intégrant dans l’Afrisa international, le Dr Nico rencontre la concurrence de deux autres solistes de talent Damoiseau et Dino Vangu qui lui font ombrage. Il finit par quitter Rochereau. Miné par la maladie, il tire sa révérence le 22 septembre 1985.
Herman Bangi Bayo