Pendant plusieurs jours après sa mort à Bruxelles, de nombreux hommages avaient été rendus au célèbre chanteur, et l’émotion nationale était palpable.
En 2024, pour l’anniversaire de son décès, quelques émissions télévisées, parmi lesquelles « KARIBU VARIÉTÉS » qu’anime notre distinguée consœur Mamie Ilela chaque dimanche sur la Rtnc, m’ont fait voyager à travers le temps pour me souvenir des grands moments vécus avec ce grand artiste, exhumant quelques souvenirs enfouis de nos relations que je peux vous relater en quelques lignes.
Ntesa Dalienst est mon aîné de plus de trois ans. Mais, je le « ngembonais » déjà en 1967 lorsqu’il venait se produire avec l’orchestre Vox Africa de Jeannot Bombenga dans le bar « Sentiment », propriété de Ebengo Dewayon, situé à l’époque sur quartier Ntomba, dans la commune de Matete.
Devenu journaliste en 1969, à l’époque où la chronique musicale n’était pas prisée, à l’exception de quelques émissions radiophoniques à la radio nationale qu’animaient les Ignace Mabeka, Suila Masuila et autres Mateta Kanda. Le journal « Salongo », grâce au journaliste Edi Mavomo, m’a permis de couvrir- occasionnellement- de tels événements musicaux sans trop d’importance comme aujourd’hui- Et, c’était juste sur une colonne ou un entrefilet. C’est pour vous dire que la musique n’avait pas encore gagné de la place dans la presse congolaise de l’époque. Alors j’ai commencé à couvrir les concerts et répétitions de nos musiciens. J’ai eu ainsi à découvrir Ntesa chez Malutama Geomas, dans le quartier Citas à Barumbu, en face du grand marché.
A l’époque où Ntesa et les autres faisaient sensation avec la chanson « Jarya ».
Le week-end, les Grands Maquisards venaient se produire dans une boîte de nuit « La Rose noire », située sur quartier Kinsaku, à Matete. Là, j’ai commencé une vie active, mais la boîte de nuit ne pouvait pas donner l’occasion de bien apprécier les musiciens : c’était trop étroit.
Des années après la débâcle des orchestres Grands Maquisards, Festival des Maquisards, Ntesa s’est retrouvé sans orchestre, et je le revois, cette fois-ci, à côté de notre doyen, le journaliste Achille Ngoye. Ensuite, il s’est mis à intégrer notre groupe de « buveurs » dans les nganda de Barumbu avec les Père Ngoye, Malanda Nsukula…
Jusqu’ à c’est qu’il me confie qu’il a des chansons, mais il ne sait comment les sortir sur 45 tours. A ce moment, il n’avait plus confiance en Verckys Kiamuangana, alors je l’ai amené chez un cousin « Effo Perso » qui habitait la commune de Matete, quartier Mongo mais qui disposait de sa maison d’édition musicale à Yolo Sud. Ce dernier, que l’on disait marabout des autorités et qui avait beaucoup d’argent permit la sortie d’un 45 tours de DALIENST NTESA dont « Papa Tshikaya » et « Sisi moke » dont je m’occupais de la promotion.
Nous continuions toujours nos beuveries dans la commune de Barumbu, après le travail à la rédaction …
Jusqu’ à ce qu’un jour il me confia son vœu d’intégrer l’Afrisa. J’en fis part à Tabu Ley : refus de ce dernier pour les raisons qui lui son propre. Il ne m’en a jamais donné les motifs.
Pour Ntesa, c’est le journaliste Père Ngoye Achille qui le conduisit auprès de Franco qui profita de l’aubaine pour l’intégrer dans le TP OK Jazz, où il fit ses preuves avant de quitter ce groupe pour s’installer en Europe où l’avait précédé son épouse Mavata…
Je le retrouve en 1988 en Europe quatre mois après mon licenciement à « Salongo ». Nouveau venu dans Mikili, sans résidence fixe pour moi … Avec mon passeport de service, Mme Ekanga Shungu m’embauche tout de même dans sa revue « Tam- Tam- » que finançait Kimbulu, beau-frère à Sétif Yale.
Je n’avais pas une résidence fixe, je dormais soit à la rédaction la nuit et le matin j’allais me laver chez le couple Ntesa, et je mangeais au restaurant Adelou/Matalanza, à la galerie d’Ixelles.
L’épouse Ntesa s’est mise à travailler comme toute femme. « mikiliste », (bayaka mabe, muasi amema mbongo n’a ndako! O KO vivre yango!). Entre-temps, Ntesa s’est mis à traîner à la galerie d’Ixelles où il jouait au loto ! Et livrait quelques concerts occasionnels. J’étais devenu alors indésirable pour l’épouse Ntesa. Mais oui. Avec raison.
A la gare du midi à Bruxelles, le couple occupait un studio (salon/chambre) et la salle de bains se trouvait juste à côté de leur chambre …Pour y accéder, j’etais obligé de taper sur le rideau qui séparait le salon à la chambre pour y accéder. Poto ya nakutaka. Différent d’aujourd’hui. Miné par des soucis, Ntesa sera opéré de cerveau.
Quelques temps après, je suis admis comme réfugié à Paris. Même en étant demandeur d’asile en France, mais ayant trouvé un travail comme cadre en Belgique, je suis parvenu à faire venir en six mois de résidence en Europe, mon épouse (Massa) et une de mes filles (Cynthia) grâce au salaire que me rétribuait Mme Ekanga Shungu (respect) qui m’avait nommé directeur de la rédaction (j’encadrais les journalistes congolais et belges comme les Ekofo ils avaient beaucoup d’estime envers ma modeste personne).
La mort de Ntesa affecta beaucoup père Ngoye. Ça nous a fait mal. A l’annonce de sa mort, j’ai pris mon train pour me rendre à Bruxelles assister à ses funérailles avant le rapatriement de son corps à Kinshasa.
Quelques années après, je rencontre Jean-Claude Gakosso, l’actuel ministre des Affaires étrangères du Congo Brazzaville. Il était fan de Ntesa pendant ses années scolaires. Au petit séminaire où il étudiait au Congo Brazzaville un bar qui se trouvait juste à côté diffusait souvent les chansons de l’orchestre Grands Maquisards.
A notre rencontre, il émet le vœu de voir la famille Ntesa : sa veuve, ses enfants et sa tombe. Comme je n’avais plus de contact avec la famille Ntesa, j’ai dû recourir à Dizzy Mandjeku et Lokombe pour les retrouver. Je suis allé avec Jean Claude Gakosso, à l’époque conseiller en communication du président Denis Sassou N’Guesso avant qu’il invite la famille à Brazzaville puis à Kinshasa où il s’est occupé de la pierre tombale de mon ami Ntesa. Et nous nous appelons, moi et Jean Claude Gakosso : Maquisards !
Voilà un pan d’histoire que je vous révèle.
Je garde toujours ses souvenirs en moi.
Repose en paix
En décembre 2001, Jean – Claude Gakosso, journaliste, professeur à l’Université Marien Ngouabi, alors conseiller en communication du président Denis Sassou N’Guesso, futur ministre de la Culture et Arts et aujourd’hui ministre des affaires étrangères, lui dédia un livre intitulé : « NTESA DALIENST ET LA SUBLIME ÉPOPÉE DES GRANDS MAQUISARDS ». Le livre est toujours disponible.
Paul Bazakana