Le président Félix Tshisekedi vient de faire de la lutte contre la corruption et le détournement des deniers publics son cheval de bataille et a promis de démanteler tous les réseaux maffieux. De la parole à l’acte, les récentes interpellations des mandataires publics et des opérateurs privés ainsi que celle de son directeur de cabinet est un signal fort de sa volonté de passer à la vitesse supérieure. Mais l’opinion souhaite que ces interpellations diligentées concernent aussi tous ceux qui ont eu à piloter certains projets majeurs dont l’exécution a été hypothéquée à l’instar de Bukanga Lonzo, Fibre optique, construction de 1000 écoles, etc.
Depuis belle lurette, la RDC est placée dans le peloton de tête de pays où la corruption, la concussion, la fraude, le détournement de deniers publics sont érigés en mode de gestion sans que leurs auteurs ou bénéficiaires ne soient incarcérés ou simplement inquiétés. C’est l’un des pays où un mandataire de l’Etat, un haut fonctionnaire ou un ministre n’ont jamais été arrêtés pour détournement ou corruption. Cela a été fustigé depuis l’époque du Marechal Mobutu qui, suite à l’ampleur du phénomène, était contraint d’ironiser : yiba ndambo, tika ndambo (vole un peu laisse un peu). De mémoire de Congolais, à quelques rares exceptions, on se souvient plus de personnes ayant été interpelées pour avoir trempé dans les caisses de l’État ou s’être livrées à la fraude ou la corruption.
La dernière mission du Fonds monétaire international, l’Union européenne et la société civile ont planché sur l’ampleur de la corruption en République démocratique du Congo qui fait perdre chaque année à la nation entre 15 et 20 milliards de dollars, alors que le budget national tourne lui en moyenne autour de 5 milliards de dollars. Cela a été corroboré par le rapport de l’ancien conseiller spécial du président Kabila, le professeur Luzolo Bambi.
Beaucoup de scandales financiers ont vu leurs auteurs simplement mis à l’écart ou libérés après un bref séjour en prison et ensuite parader à travers les rues de la ville sans avoir remboursé un kopeck au trésor public. Et d’ailleurs, cette catégorie de personnes étaient protégées par des magistrats véreux dont certains ont été radiés de la magistrature.
L’existence de ces réseaux maffieux a fortement grevé les finances publiques en privant l’État de ressources substantielles pour le développement du pays.
Le président Felix Tshisekedi s’est dit, lors de son allocution au Parlement réuni en congrès, être au courant de ces pratiques et a promis de démanteler ces différents réseaux pour faire renaître la confiance à l’endroit du peuple congolais et de partenaires de la RDC.
En attendant la création d’une structure judiciaire, voire d’une juridiction spécialisée dans la lutte contre la corruption, la fraude fiscale, le blanchiment des capitaux ainsi que le détournement des deniers publics, le chef de l’État a enjoint au gouvernement de mettre en place des structures appropriées devant, de manière permanente, s’atteler à cette tâche indispensable et de multiplier les efforts afin de renforcer les mécanismes de vérification, de contrôle et de surveillance dans les secteurs enclins.
Le président l’a lui-même souligné en ces termes : « La RDC est parmi les pays les plus corrompus du monde. Mais vous n’avez jamais un seul procès qui met en cause les corrompus et les corrupteurs. » « Soit la justice n’est pas prête, soit elle n’a pas l’expertise », souhaitant la mise en place d’une véritable « agence de lutte anticorruption » en lieu et place de l’« agence pour le changement des mentalités » qui ne produit aucun effet.
Ainsi, la lutte contre ce fléau contribuera à l’amélioration du climat des affaires, gage de l’afflux massif d’investisseurs.
Le pays trop longtemps saigné, d’aucuns souhaitaient voir le président de la République diligenter des audits sur bon nombre d’importants investissements que le Trésor public a financés mais qui ne sont pas allés à leur terme. Pour ce, les différents responsables devraient rendre compte des montants décaissés et des travaux réalisés.
Conditionnant leur soutien à la lutte contre la corruption, les partenaires bilatéraux et multilatéraux attendaient aussi voir le président de la République passer en actions sans quoi leur engagement d’accompagner la RDC se limiterait aux promesses et aux bonnes intentions.
Les récents événements des arrestations des mandataires des entreprises de l’État et du directeur de cabinet du chef de l’Etat ainsi que celle des prestataires de services viennent réconforter l’opinion publique sur la volonté du président de la République à combattre ce fléau et à assainir les finances publiques afin de lui doter des moyens susceptibles de relancer l’économie nationale.
En effet, dans ce combat le président de la République ne doit pas s’arrêter au milieu du gué mais plutôt franchir la rivière en mettant sur la table tous les dossiers ayant fait l’objet de suspicions afin d’engager ou de dégager les responsabilités des uns et des autres.
Les deniers de l’État reviennent au peuple congolais et tous ceux qui les ont indûment détournés doivent en répondre même s’ils ne sont plus aux affaires et ils ne doivent bénéficier d’aucune imprescriptibilité, de faveur ou de grâce présidentielle.
Un travail a été fait en amont par l’ancien conseiller spécial du président Joseph Kabila, Luzolo Bambi et le chef de l’Etat peut s’y référer pour interpeller tous ceux qui se sont livrés dans la corruption et les détournements.
Tous les projecteurs sont actuellement braqués vers la Cité de l’UA pour voir jusqu’où ira le président de la République face à sa promesse de démanteler tous les réseaux maffieux sans exception aucune et que cela ne se limite pas aux faits d’annonce mais démontre une volonté ferme de combattre ce fléau qui gangrène le développement du pays.
Herman BANGI BAYO