Rond-point Victoire, carrefour à sens giratoire. Le lieu est marqué par la Place des artistes, un des principaux sites culturels et artistiques de la ville. Située sur la commune de Kalamu, au cœur de la cité et du quartier de Matonge, Place Victoire est le centre de la vie nocturne de la ville, symbolisée par une œuvre d’art du sculpteur congolais Alfred Liyolo : une stèle située au beau milieu représentant deux mains rassemblées, dédiée aux artistes congolais décédés : musiciens, peintres, sculpteurs, comédiens, écrivains. On y a juxtaposé une statue de Luambo Franco. Ce site, inauguré en 1990 par les gouverneur Fundu Kota est adjacent à la Place Victoire, jadis un haut lieu d’ambiance et de la musique à Kin. En référence à feu Papa Wemba et à son Village Molokaï non loin, mais aussi pour tous ces bars (le Vis-à-Vis, la Crèche…).
Faits marquants
La Place de la Victoire (en fait le rond-point) tire son nom des hauts faits de la Force publique entre 1940 à 1945 sur les champs de bataille africains, venus fêter leur victoire en 1945 en ce lieu.
C’est notamment là que Patrice Lumumba tient son premier meeting, le 28 décembre 1958, devant plus de 10 000 personnes. C’est également sur cette place et à proximité que commencent les émeutes du 4 janvier 1959.
Suite à sa proximité avec le bar Vis-à-vis, qui faisait office de sanctuaire des orchestres kinois, cette place était l’épicentre de l’ambiance de la ville de Kinshasa et tous les orchestres en vue s’y produisaient et les jeunes groupes y prenaient leurs baptêmes du feu. De l’African Jazz à Victoria Eleyson en passant par l’Ok Jazz, Cobantou, African Fiesta Sukisa et National, les Negros succès, le Bella Bella, Zaïko Langa Langa, les Maquisards, Viva la Musica, Quartier Latin, Wenge Musica, ce sanctuaire était un passage obligé pour tout orchestre ou artiste à la recherche de la notoriété. Les gens venaient de quatre coins de la ville pour vivre l’ambiance qui y régnait et d’autres venaient des contrées lointaines pour palper des doigts l’ambiance de Matonge.
Petit à petit ce lieu a perdu de sa superbe avec la fermeture du bar Vis-à-vis et est devenu par la force de choses l’antre des délinquants et des commerçants ambulants. Aujourd’hui, elle se distingue plus par des boutiques d’habillement et de vente de téléphones et accessoires, des cybercafés, des buvettes, des restaurants, maisons de disques, studios d’enregistrement ou maisons de production etc. que par l’activité musicale.
Aménagé il y a près d’une vingtaine d’années en Place des artistes, cet endroit n’est pas animé excepté quelques productions sporadiques ou passages de dépouilles de musiciens alors qu’elle devrait accueillir des manifestations culturelles. Quelques artistes bénéficient des plaquettes à l’instar de Papa Wemba, Simaro, Grand Kalle, Botembe, Lufua, Brazzos, Mangau, etc. et tant d’autres, des centaines, de Wendo à Sunda Bass, en passant par Bowane, Franco, Rochereau, Roitelet, Rossignol, Bavon Marie Marie, Frères Soki, Vadio Mambenga, Lucie Eyenga, Abeti Masikini, Mpongo Love, etc. ont leurs noms gravés sur le marbre mais qui sont presque illisibles. Au quotidien, cet espace sert de cadre aux photographes qui immortalisent certains visiteurs de passage sur le lieu et aux vendeurs de divers produits. De nombreux enfants de la rue, appelés Shegués, y exercent également des emplois variés (crieurs, porteurs de fardeaux, manutentionnaires, commissionnaires) mais également du vol à la tire, principalement sur des victimes féminines (téléphones portables, bijoux, argent, etc.).
La promiscuité qui y règne ne permet pas de mettre en valeur ce site qui constitue l’un des patrimoines culturels, touristiques et historiques de Kinshasa.
Herman Bangi Bayo