« Le blanc a créé le vêtement et le Congolais a créé la Sape », a affirmé mordicus un sapeur. Aujourd’hui, Brazzaville s’identifie à la Sape et est devenue le berceau de la sape. La sape est une vieille tradition qui remonte de l’après Deuxième Guerre mondiale avec les anciens combattants et les étudiants partis étudier en France vers les années 50.
Plusieurs sapeurs venant de quatre coins de la ville de Brazzaville se retrouvent à Bacongo pour parader et l’avenue Matsoua sert de terrain de prédilection avec ses multiples dancings-bars.
Après une journée bien chargée, les sapeurs mettent tout ce qu’ils ont de beau et de valeureux comme vêtements et investissent la Place Degui. L’espace Degui est un carrefour de plusieurs bars donnant sur l’avenue Matsoua, du nom d’un célèbre résistant de l’ère coloniale, à Bacongo dans le deuxième arrondissement de la capitale du Congo Brazzaville.
Une tradition instaurée depuis l’ère coloniale où l’on vient se montrer en fin de journée tel un défilé de mode. Au coucher du soleil, les sapeurs arrivent doucement, un à un, l’air endimanché, certains débarquent des taxis et d’autres longent les trottoirs à pied. Le week-end commence dès vendredi à la place Degui. On distingue deux types de sapeurs, les premiers se résument à la manière de se vêtir à l’occidentale, quant au second type de sapeurs, ils sont dans l’exhibition, dans le paraître, pouvant porter des couleurs criardes.
Tirés à quatre épingles, ils ont enfilé, chacun à sa manière, un costume, une chemise, une cravate made in Italy ou In France ou autre grande enseigne. Et il n’y a pas que des originaires de Bacongo ou de Makelekele, d’autres viennent de Moungali, Poto-Poto, Ouenze et Talangai, des quartiers situés très loin de Bacongo.
Les sapeurs viennent de tous les arrondissements avoisinants pour exhiber leurs habits et faire du « m’as-tu vu ».
La compétition est de fois rude entre les membres de la diaspora qui viennent passer les vacances et les Brazzavillois branchés. Certains Brazzavillois se ravitaillent auprès de ceux qui reviennent de l’Europe ou auprès des membres de famille vivant en Europe ou carrément ils s’approvisionnent auprès des magasins de luxe de Brazzaville.
Du coup, une compétition spontanée d’exhibition d’habits prend forme et tout se passe sans heurts. La sape n’est pas seulement une histoire de luxe mais aussi une culture de l’élégance.
Un autre sanctuaire de sapeurs est le bar la Main Bleue, un débarcadère en aval du Beach fluvial de Brazzaville mais pas vraiment prisé par les sapeurs à cause de son enclavement. Les sapeurs aiment les milieux ouverts où ils regardent tout le monde et sont sûrs que tout le monde les regarde.
Même en temps de crise économique comme c’est le cas actuellement, les sapeurs font tout pour soigner leurs apparences, être à la mode des dernières tendances vestimentaires et paraître toujours élégants aux yeux des badauds et nombreux curieux qui sont attirés par leurs tenues et autres gestuelles qu’ils font lors de ces retrouvailles.
Herman Bangi Bayo