Mon père était un activiste lumumbiste et présidait la section du MNC à Kisangani, Stanleyville à l’époque. Ma mère encadrait les femmes nationalistes du parti de Lumumba, le Mouvement national congolais (MNC). Et ma tante paternelle, qui était la présidente des femmes nationalistes de Stanleyville, est décédée de manière tragique », entame Asimba Bathy.
L’histoire de Lumumba et de l’indépendance, il la connaît bien pour l’avoir vécue de très près quand il était jeune. « Avec les événements de 1964 à Stanleyville, ma famille a dû fuir la ville et abandonner tout ce qu’elle avait. Nous étions douze et avons vécu trois ans dans la forêt. Nous avons tous survécu mais c’était terrible ».
« Lumumba était un modèle »
«Lumumba. Un homme, une histoire, un destin», Asimba Bathy, Editions du Crayon noir, 2021. L’album n’est pas disponible en librairie en Belgique mais peut être commandé via la page Facebook de l’auteur. «Lumumba. Un homme, une histoire, un destin», Asimba Bathy, Editions du Crayon noir, 2021. L’album n’est pas disponible en librairie en Belgique mais peut être commandé via la page Facebook de l’auteur.
Soixante ans plus tard, Asimba Bathy présente fièrement son album BD sur la vie de Lumumba. « Je me suis concentré sur l’homme, d’où il venait, comment il en est arrivé là. J’ai voulu montrer qui il était vraiment et non pas ce que certains en disent qui l’accusent d’être à l’origine de tous les maux du Congo… On essaye de salir son image mais ce n’était pas un bandit. C’était une personnalité forte, un modèle », poursuit l’auteur qui, en bon autodidacte, a écrit le scénario, réalisé tous les dessins et signe aussi le coloriage.
Cette BD unique sur la vie de Lumumba est disponible depuis le 12 janvier, juste à temps. « J’ai mis deux ans à la réaliser et elle était prête depuis trois ans. Si elle sort maintenant, à l’occasion du 60e anniversaire de son assassinat, c’est une coïncidence mais ça tombe bien. J’ai dû attendre trois ans avant de trouver les fonds nécessaires pour pouvoir l’imprimer dans une édition de qualité », poursuit Asim ba Bathy.
Dans sa BD, on apprend entre autres que le héros de l’Indépendance congolaise ne s’appelait pas Patrice Emery Lumumba à sa naissance mais Isaïe Tasumbu Tawosa. A l’école, en froid avec son père, il se fait d’abord appeler Patrice Lomumba que les missionnaires prononceront Lumumba. « C’est toujours comme ça avec ces blancs incapables de prononcer correctement nos noms, ils les transforment à leur guise », peut-on lire dans la bouche de son père François Tolenga en page 8 de l’album.
« Il y a déjà beaucoup de publications sur Lumumba mais la plupart ne parlent que de sa vie politique. Moi, je suis reparti de son village à sa naissance, sa scolarité, son adolescence… Je suis entré dans sa vie. Vers la fin, j’ai effleuré son parcours politique mais je ne voulais pas m’enliser dans les histoires politiques. Je voulais présenter l’homme, tel quel. Lumumba est une étoile qui brille et qui peut faire briller des vies. C’est aussi un hommage à mes parents », raconte Asimba Bathy qui vit à Kinshasa mais est « coincé » à Liège depuis le début confinement.
« Sa mort n’a apporté aucune réponse »
Que représente Lumumba aujourd’hui au Congo ? « Sa mort n’avait pas de raison d’être. Il y a eu beaucoup de cabales autour de lui. Certains présentent une mauvaise image de lui alors qu’il a été victime d’un vaste complot et y a laissé la vie. Il n’avait que 30 ans, a laissé ses enfants et sa femme qui est restée veuve jusqu’à sa mort en décembre 2015 à l’âge de 72 ans », précise Asimba Bathy.
Pour lui, l’élimination physique de Lumumba n’a apporté aucune réponse à personne. « Est-ce que le Congo appartient vraiment aux Congolais aujourd’hui ? Qui tire les ficelles ? », se demande Asimba Bathy en ajoutant que le Congo est suffisamment riche de son sous-sol pour pouvoir profiter à tout le monde sur de nouvelles bases plus saines.